Episode 31. Les Antigueños ont la Vib' (prononcez: vaib)
Depuis
une semaine ou presque, je me rends tous les matins à l’aube (9h. Oui,
9h, c’est l’aube, puisqu’en France c’est l’heure à laquelle je me lève.
Heureusement le décalage horaire m’a aidée à m’adapter à ce
chamboulement métaphysiologique de mes habitudes édredonesques, et
c’est donc sans peine que je me lève à 8h pour cheminer tranquillement
jusqu’au centre de recherche de la Antigua où la bibliothèque m’ouvre
ses portes. Fin de la parenthèse) à la bibliothèque, où, oui
messieurs-dames, je travaille. Je ne suis pas ici en vacances,
contrairement à ce que certains ont suggéré dès avant mon départ.
Mais
être studieuse n’empêche pas d’avoir l’œil aux aguets (bien que l’œil
soit rougi par les heures passées devant l’ordinateur, ajoutées à
celles passées devant la télévision – ah ! Sony et Warner Channel !) et
de relever ces petites choses qui font le piquant du Guatemala…
Figurez-vous
qu’en deux ans, les habitudes des antigueños (les habitants d’Antigua)
ont changé, et que le vélo est devenu un moyen de locomotion à la mode.
A y regarder de plus près, on se demande bien pourquoi, et surtout
comment les habitants de la ville et de ses alentours ont bien pu avoir
cette idée saugrenue d’utiliser le vélo : pour préserver la couche
d’ozone ? Pour se faufiler plus vite dans les embouteillages quasi
inexistants ? pour faire de l’exercice ? Pour faire comme Paris et Lyon
et leurs vélibs / vélovs ?
Une chose est sûre : ce n’est
certainement pas pour le bien de leur colonne vertébrale ou pour
préserver leur fierté. Car un petit détail entraîne bien des
complications : toutes les rues – je dis bien toutes les rues –
d’Antigua sont pavées. Et pavées à la guatémaltèque, autrement dit de
manière artistique et irrégulière.
Au final, un spectacle étonnant
: les popotins sont secoués de vibrations étranges, les joues rebondies
semblent habitées d’esprits frappeurs, et les chambres à air ont une
durée de vie sans doute éphémère… Vous comprendrez pourquoi j’ai
élégamment refusé de me rendre en vélo au restaurant de mes amis,
pensant à mes lombaires douloureux et à ma cellulite galopante qui s’en
serait donné à cœur joie pour prendre vie à mon insu, sous l’effet des
bonnes œuvres de la DDE guatémaltèque.
Il faut dire que les rues
sont en réalité habitées d’une multitude de drôles de véhicules,
puisqu’aux côtés des vélos on croise parfois des carrioles pour
touristes, dont les chevaux portent leur fameux sac-à-caca, des quads,
des motos, des voitures de toutes marques et toutes époques qui
s’agitent elles aussi au rythme des pavés, et enfin des tuc-tuc
(prononcez touc touc), triporteurs où la vibration antigueñienne se
fait sentir elle aussi…
En résumé, quel que soit le véhicule, les antigueños ont la vib’, sont dans le mouv’, et vous disent : parle à ma main !