Episode 39. Palpitations livresques (3) : gymnastique archivistique
Non
! l’intellectuel, le chercheur, l´étudiant, l’historien ne sont pas des
personnes qui ne cultivent que leur intellect ! Ceci est un cliché bien
trop répandu ! Le chercheur exerce lui aussi une activité physique, et
ce dans le cadre de son travail, qu’on se le dise !
Sans parler des
personnels de bibliothèque qui doivent monter et descendre huit étages
sans ascenseur pour les besoins de ma cause, le chercheur lui-même fait
fonctionner ses petits muscles tout au long de sa studieuse journée !
Tout
d’abord, les doigts et le poignet : le chercheur écrit beaucoup, sur
son cahier ou bloc-notes. S’il n’est pas au Guatemala dans la zone 1,
il peut même emmener son ordinateur et taper sur le clavier, ce qui a
l’avantage de faire travailler les deux mains, et non pas seulement la
main qui tient le stylo.
Ensuite vient l’exercice photographique :
le chercheur pressé, qui n’a que trois mois pour voir un maximum de
documents, photographie une bonne partie desdits documents (je vous
laisse imaginer la quantité de pages à lire une fois rentrée en France…
mieux vaut ne pas y penser trop intensément). Deux types d’exercices :
tout d’abord, l’exercice qui consiste à feuilleter le document, et
quand une page intéressante apparaît, se lever, se mettre en position
stable (autrement dit les jambes légèrement écartée, les coudes bien
positionnés et les mains cramponnées à l’appareil), et appuyer
fermement de l’index sur le bouton de l’appareil. Puis se rasseoir, et
feuilleter de nouveau, avant de se lever à chaque fois qu’une page
digne d’intérêt photographique montrera le bout de son nez. Le deuxième
exercice lié à la photo nécessite l’utilisation d’un trépied, utile
lorsque l’on veut photographier un document entier, puisqu’il évite
d’avoir à se lever constamment, et permet une netteté incomparable des
photos. Le chercheur reste alors assis, une main sur le document pour
s’assurer que la page est bien cadrée, et l’autre qui doit se hisser
jusqu’en haut du trépied pour déclencher l’appareil-photo. L’exercice
répété fortifiera le bras droit ou gauche, c’est selon, du chercheur,
tandis que l’autre bras restera totalement atrophié. L’idéal serait
donc de s’entraîner à appuyer sur le déclencheur de l’appareil de
l’autre main, ceci sans passer le bras devant l’objectif… des progrès
restent à faire.
N’oublions pas bien sûr les marches à monter et
descendre pour atteindre les différentes salles des centres d’archives
et autres bibliothèques.
Enfin, les yeux étant eux aussi une partie
du corps, il est évident qu’ils sont l’outil essentiel du chercheur et
opèrent une gymnastique constante, voire excessive : réfléchissez, et
calculez le nombre d’enseignants-chercheurs et apprentis chercheurs de
votre connaissance qui portent des lunettes… comme quoi, c’est un
métier à risque...